pourquoi nous forcions nous donc à errer, à revenir dans ce village, pourquoi malgré tout nos voyages, pourquoi malgré notre naissance en Grèce, nous revenions sans cesse ici ? sûrement car nous possédions une grotte cachée avec de multiples trésors d'un temps ancien ; ou bien parce que nous ne souhaitons guère rester trop longtemps en Grèce par peur de quoi ? de voir revenir d'entre les morts notre lié ? sublime blague qui nous permet d'esquisser un semblant de sourire cruel ; il devait bien exister des invisibles ayant un semblant de nos pouvoirs ; mais bon, même si par miracle ou malédiction iels y arrivaient, cela ne nous ferait ni chaud ni froid ni tiède ni glaciale.

perdus dans nos pensées pas si pensées puisque nous ruminions nous en fichant complètement de déranger les éventuels visionnaires qui nous fixaient ; en même temps, voir un individu capuchonné qui murmure de sombres paroles avec une canne incrustée d'un crâne ne devait pas les rassurer - certains changeant même de trottoir. mais nous ne nous préoccupions guère de tout cela, nous dirigeant vers une ruelle pour ne plus les percevoir ; pour ne plus les entendre aussi - nous n'étions ni enclin à nous amuser avec eux, ni à les tourmenter - nous n'en avions pas besoin pour vivre dans tous les cas.

avançant d'un bon pas, nous ne remarquions même pas qu'un gosse arrivait tout courant, tout heureux, avec une énorme glace qui se répandit sur notre cape tandis qu'il chutait à même le sol, son fessier sur le sol dur. bien fait. froncement de sourcils et voix grave, cassante, « les gosses de nos jo- » ne pouvant même pas finir qu'il commençait déjà à pleurer de peur, de dépit ou de tristesse, nous n'en savions fichtrement rien tandis que la glace se répandait un peu plus sur notre cape, maugréant. nous n'étions de toute façon guère doués avec les gosses et nous ne voulions pas l'être - nous aurions pu partir tranquillement mais puisqu'il nous avait heurté, nous avions en face de nous un visionnaire ; et quoi de mieux que de nous amuser un petit peu ?

pliant nos genoux, un sourire bien long, bien large, bien flippant sur notre visage, nous le fixions sans mot dire. existe-t-il une police des invisibles ... ?

mais bon, que pourrions-nous faire pour lui faire comprendre de ne plus courir sans regarder devant soi ? ou bien pour ne plus heurter sans s'excuser aussi au préalable ? une petite menace à la mode d'un dieu de l'enfer, en lui disant que des démons viendront se cacher sous son lit pour l'emmener dans notre royaume, si jamais il recommençait ? cela pourrait être assez hilarant - cela pourrait même être pas mal ; non, ce n'était pas de la méchanceté, juste un peu de sadisme, nous léchant nos lèvres, nous apprêtant à prendre notre voix la plus grave qui soit pour invoquer cerbère.

nous n'eûmes même pas le temps de pouvoir invoquer dans une mer de flamme les trépas de ce gosse que nous reçûmes un coup sur le sommet de notre crâne, nous forçant à lâcher notre canne pour couvrir la blessure de nos deux mains, un cri peu gracieux sortant de nos lèvres, nous roulant sur le sol si nous n'avions pas un tant soit peu de dignité. cette scène nous rappelait malheureusement une scène datant d'il y a plusieurs siècles, de celle qui nous valu une bosse par une fichue banshee - et maintenant, encore une ?! c'était quoi cette fois ?! un tigre enragé ?! un humain intrépide et curieux ?!

nous redressant de toute notre stature, ramassant notre canne pour l'utiliser à des fins de tapage de tête ; nous nous retournons vers l'individu. un haussement de sourcil bien haut ; l'individu était mince, faible ( non que nous soyons mieux lotis ) et bigrement invisible au vu de son aura - encore un fichu héros qui allait nous faire une leçon de morale ? jamais.

« c'est une manie chez autrui de taper sur tout ce qui bouge ? bordel ! » le gosse s'étant réfugié derrière l'individu, nous laissant le soin de le fusiller du regard puisque nous subissions cet affront à cause de son erreur ; de ne pas regarder devant soi. même nous, nous regardions devant nous - en même temps, nous n'étions pas accaparés par des choses futiles comme une glace. prêt à tendre notre canne vers le gosse, nous préférons la lever bien haut devant l'invisible devant nous.

oui,
le roi des enfers brandit une canne incrustée d'un crâne
prêt à mettre un revers au curieux en face.

le respect se perdait, la crainte de notre nom se perdait, la crainte de la mort toujours présente mais de moins en moins tandis que les humains vivaient de plus en plus longtemps ; l'enfer n'était qu'un simple mot et guère étaient encore les humains croyant réellement à un enfer ou un paradis ; et même si c'était le cas, point l'enfer de nous-même. c'était ainsi ; et pourtant, le ridicule était que si un humain entendait notre nom, il le connaissait, savait qui nous étions - appris à l'école, appris dans des études souvent supérieures tout autant ; dans des bds, des livres, des séries ou des jeux - nous étions déclinés et utilisés.

« Voulez-vous une autre tape pour vous remettre les idées aux claires ? Depuis quand martyriser un enfant humain est une chose censée en ce monde ? » notre regard qui se lève aux cieux quand nous jurons à zeus de bien vouloir faire pleuvoir des éclairs par millier pour pourfendre le malheureux ignorant qui se pense être un brave héros ; est-ce qu'il va crier "power ranger rouge" bientôt ? bien entendu, notre frère nous ignora - il n'a jamais apprécié que nous lui rappelions qu'il n'était pas l'aîné, trop susceptible pour son égo.

« Vous n’avez vraiment rien de mieux a faire monsieur …. ? » et en plus de cela, un pur idiot qui s'attaquait à autrui sans connaître sa place « hadès. le roi des enfers grecs. » notre dos qui se redresse, notre canne fièrement pointée vers l'imprudent « surement bien plus âgé que vous. » nous ne savions guère son âge, mais nous doutions qu'il ne soit probablement pas aussi vieux que nous - les anciens ont tendance à avoir une dégaine, une énergie un peu différente ; à force de parcourir le monde, nous le sentions.

« et si vous aviez un peu plus les idées claires dans votre esprit, vous remarqueriez une trace sur ma cape. ça y est, vous faites le lien ? » du sarcasme suintant de nos lèvres, une canne qui fait l'aller-retour entre la tâche et le gosse « si nous voulions faire du mal au gosse, il serait déjà sept pieds sous terre. » peut-être pas, peut-être bien que si ; mais nous n'allions certainement pas lui confirmer ou non quoi que ce soit.

qu'il croit donc qu'un roi des enfers est cruel ;
non guère lasse d'une perpétuelle vie -
qu'il nous craint, enfin !